Avec Omega Men et Sheriff of Babylon, Tom King porte 2 regards subtils et complémentaires sur le monde actuel

(image © DC Comics/Vertigo)

Tom King, vous le connaissez sûrement pour son run sur Batman. Mais à travers d’autres séries moins connues, Tom King construit progressivement un point de vue intéressant sur la situation géopolitique de notre monde actuel. Analyse.
■ par Ben Wawe

 

Tom King est la star montante des comics. Il signe depuis plusieurs années les intrigues de la série régulière Batman. Récemment le scénariste a remporté un Eisner Award (mérité) pour Mister Miracle. Ancien agent de la CIA en Irak, Tom King utilise son expérience pour enrichir ses scénarios et notamment sur la psychologie des personnages. Comme Heroes in Crisis, saga sur le stress post-traumatique des superhéros. Ou bien encore Omega Men et Sheriff of Babylon qui décrivent, eux, l’impact de la présence américaine en Irak. Pour cela, Tom King utilise 2 voies et voix complémentaires.

 

 

Omega Men et Sheriff of Babylon, récits uniques et contemporains

Tom King scénarise Omega Men et Sheriff of Babylon, 2 miniséries de 12 épisodes chacune, publiés ensemble entre 2015 et 2016. Omega Men est dessiné essentiellement par Barnaby Bagenda, et reprend d’anciens personnages DC créés dans les années 80. Les Omega Men luttent pour libérer le Système Véga de l’emprise de la Citadelle, conglomérat galactique attiré par une précieuse ressource. Sheriff of Babylon est dessiné par Mitch Gerads, comme Mister Miracle. Cette production Vertigo évoque le quotidien de Chris Henry, consultant pour créer une police à Bagdad. A priori, ces 2 titres n’ont que peu de points communs. À y regarder de plus près, Omega Men et Sheriff of Babylon offrent 2 grilles d’analyse de l’impact de la présence américaine en Irak.

 

 

Un évènement, 2 points de vue complémentaires

Le terme « macro » évoque les phénomènes à grande échelle, tandis que « micro » vise les évènements plus locaux ; pour macroéconomie et microéconomie. Tom King utilise le média comics afin d’offrir une vision macro de l’occupation américaine via Omega Men, et une vision micro du même phénomène via Sheriff of Babylon. Le scénariste évoque autant les ravages, les déboires, la folie et l’absence de sens de tels évènements dans les 2 titres, mais sous des visions différentes et complémentaires.

 

 

Omega Men : vision macro de la résistance extrême et religieuse

Dans Omega Men, la Citadelle exploite le Système Véga pour le stellarium, une substance difficile à obtenir qui empêche le cœur des planètes d’exploser (comme Krypton par exemple). La Citadelle manipule, tue et complote pour en obtenir, pour s’enrichir mais aussi repousser les menaces de ses clients. Cela provoque une résistance puissante des Omega Men, qui s’unissent aussi autour de la religion locale entre Alpha (la vie) et Oméga (la mort). Les Omega Men luttent pour leurs libertés, mais aussi au nom de cette religion dans une voie extrémiste. À 1re vue, tout ceci correspond à des éléments de SF classique. Mais à y réfléchir, le parallèle avec l’Irak est flagrant, et même assumé dans les bonus de fin. Remplaçons « stellarium » par « pétrole », et « Omega Men » par « djihadistes » et nous arrivons à un récit trouble, connoté par le conflit irakien. Récit qui ne valorise jamais les Omega Men, auteurs d’actes affreux et inexcusables… face à une Citadelle autant inhumaine, et qui a versé le 1er sang. Illustration en grand format, et sans espoir, de l’horreur face à un ennemi qu’on ne veut plus comprendre ou tolérer.

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