Qui est le Joker ? Les vraies origines du Clown Prince du Crime !

 

Un Joker au poil

Au milieu des années 60, le Joker s’incarne pour la 1re fois à l’écran dans la série télévisée Batman imaginée pour le très grand public. L’acteur Cesar Romero campe un Joker loufoque monté sur ressort. Un coup de pouce pour la popularité du personnage. La série cartonne auprès du grand public et des enfants, si bien que cette vision du Joker devient rapidement le canon à suivre. Le problème, c’est que le Joker n’est plus du tout crédible dans son rôle de croquemitaine dangereux : en quelques années, on est passé d’un quasi serial killer à un criminel très burlesque qui n’inquiète plus personne !

 

 

Un Prince du Crime concurrencé par le Bouffon Vert

(image © DC Comics)

Au début des années 70, DC Comics commence à prendre conscience qu’il va falloir redonner du mordant au Joker. On confie à Denis O’Neil une série en solo où il croise la route d’autres personnages DC Comics, superhéros comme supervilains. Et en 1973, à quelques mois d’intervalles, deux épisodes vont se répondre, soulignant à quel point le Joker n’est peut-être plus le Prince du Crime… Amazing Spider-Man n°121 : le Bouffon Vert (assez proche du Joker par certains côtés) jette Gwen Stacy du haut du George Washington Bridge avec la fin tragique qu’on connait. Quelques semaines plus tard, Joker n°4 : le Joker s’apprête à jeter la petite amie de Green Arrow d’un pont… Mais celle-ci survit ! Sans doute que DC ne souhaite pas sacrifier son personnage, même secondaire et ce, contrairement à la concurrence. De façon emblématique, les choses sont clairs : le Joker n’est plus vraiment le Prince du Crime : la concurrence est de plus en plus violente. Mais la décennie des années 70 se termine par une phase qui annonce alors la noirceur des années 80 à venir. Dans Detective Comics n°475 et 476, le scénariste Steve Englehart et le dessinateur Marshall Rogers mettent en scène un Joker plus incisif, plus menaçant. Il infecte animaux et humains avec un poison qui transforme gueules et visages à son effigie grimaçante. Un changement d’échelle dans le Mal particulièrement notable : de « gentil » farceur criminel il devient terroriste, un agent du chaos.

 

 

Fou à lier

Killing Joke
(image © DC Comics)

Dans les années 80, 4 comics vont véritablement transformer le Joker et le ramener dans son rôle du vilain transgressif. En 1986, dans Dark Knight Returns, Frank Miller et Klaus Janson mettent en scène Batman et le Joker comme 2 facettes antagonistes (et complémentaires) : le Joker sème le Chaos pendant que Batman défend l’Ordre. Et l’un n’existe pas sans l’autre : pendant Bruce Wayne profite de sa retraite, le Joker végète à l’asile d’Arkham. Il suffit que Batman se réveille pour que le Clown reprenne ses activités criminelles. Avec une nuance qu’on ne lui connaissait pas vraiment : Frank Miller suggère l’homosexualité du Joker à travers « Bruno », son compagnon homme de main androgyne. Encore que question sexualité, le Joker est un personnage complexe. Le sexe n’est pour lui qu’un outil pour atteindre ses objectifs déments… et ses victimes n’ont généralement pas le temps de s’en rendre compte ! Deux ans plus tard, dans Killing Joke Alan Moore et Brian Bolland accentue la violence du Joker. S’appuyant sur le Detective Comics n°168 de 1951, les auteurs tentent d’humaniser le personnage et y ajoute une touche sociale. Et y affirme définitivement le caractère transgressif d’un Joker, qui dorénavant ne suit plus le code moral des autres vilains DC : le Prince du Crime dénude et mutile Batgirl en lui brisant la colonne vertébrale. Toujours en 1988, dans la saga Un Deuil dans la famille, Jim Starlin et Jim Aparo déroulent : le Joker capture un autre allié de Batman, Jason Todd, le 2e Robin, le torture puis le massacre à coup de barre à mine. Le temps où le Joker hésitait à balancer la copine de Green Arrow d’un pont semble révolu : sans foi ni loi, le Joker peut tout faire. En 1989 parait le dernier comics qui installe le Joker au sommet des tueurs en série les plus populaires des comics : Arkham Asylum signé Grant Morrison et Dave McKean. Le Joker provoque une émeute dans le célèbre asile pour attirer Batman avec comme arrière-pensée de lui prouver qu’en fin de compte, ce dernier est aussi fou que lui.

La suite ? Tout de suite !




A propos Stéphane Le Troëdec 628 Articles
Stéphane Le Troëdec est spécialiste des comics, traducteur et conférencier. En 2015, il s'occupe de la rubrique BD du Salon Littéraire. Ses autres hobbys sont le cinéma fantastique et les jeux. Enfin, et c'est le plus important : son chiffre porte-bonheur est le cinq, sa couleur préférée le bleu, et il n’aime pas les chats.