All-New Venom : pourquoi le tome 1 fonctionne (sans spoiler l’identité du nouvel hôte)

All-New Venom
Temps de lecture estimée : 4 min.

All-New Venom démarre comme un polar : une cour de justice, de potentiels hôtes du symbiote, des indices distribuées à la volée, et… un Venom qui surgit au pire moment (et donc au meilleur pour le lecteur). Al Ewing s’amuse à faire tourner le lecteur en bourrique, à coup de dialogues malins et de faux-semblants qui relancent le mythe sans le dénaturer. On coche les cases du « qui peut bien être le nouvel hôte ? » tout en retrouvant une promesse simple : s’amuser avec Venom, et pas faire une thèse sur la culture klyntar.

Autre bon point : même si l’intrigue succède à Venom War, ce tome reste lisible. On capte vite la nouvelle relation entre Dylan (le fils d’Eddy Brock), Mary-Jane et Paul, le tout sans avoir à réviser dix ans de continuité. En deux chapitres, All-New Venom installe tranquillement son jeu de piste : quatre suspects potentiels, une silhouette noire et dorée, et des indices disséminés jusque dans les punchlines du symbiote.

Un Venom « or » qui parle, cogne… et s’amuse !

Le pari culotté d’All-New Venom, c’est ce ton léger sans perdre la nervosité. Le costume doré claque, la gouaille surprend, et pourtant l’icône reste menaçante quand il faut. Al Ewing assume une veine « fun » qui n’annule pas la brutalité : le monstre rit, puis mord. Et ça marche, parce que le mystère irrigue chaque page.

Côté pouvoirs, on découvre des variations inventives : absorption d’explosifs, canons de toiles, métamorphoses express. Par moments, l’énergie « cartoon » frôle celle des Looney Tunes ; si vous venez pour du grim & gritty intégral, vous lèverez très certainement un sourcil. Mais ce parti pris donne une personnalité immédiate à All-New Venom, distincte des ères cosmiques récentes de Donny Cates.

Dylan Brock, détective malgré lui

La traque de Dylan Brock structure le tome et cristallise la tension : ado tête brûlée, il fonce vers la vérité en se cognant aux adultes (coucou Paul) et aux zones d’ombre liés au symbiote. Ses face-à-face avec All-New Venom sont les meilleurs passages : vannes, menaces, indices… et cette relation inversée où le monstre semble presque le « cadrer ».

En contrechamp, le trio Robbie Robertson/Luke Cage/Rick Jones forme le groupe d’enquêteurs. Leurs scènes ont un ton qui aère l’action, tout en éliminant méthodiquement des suspects. Résultat : la réflexion bat son plein sans casser le rythme.

All-New Venom : l’action, la vraie

Quand ça tape, ça tape fort. Carlos Gómez compose des bastons lisibles, pleines d’idées visuelles (longue langue pandouillante, mâchoires qui changent d’échelle, corps élastique). La mise en scène exploite des décors contraints (le tribunal, l’entrepôt) pour créer de la pression, avant d’ouvrir grand les vannes contre des vilains bigger than life.

Seul bémol : le combat « XXL » contre MODOK s’étire sur deux épisodes. La décompression ne gâche pas le plaisir (les trouvailles abondent) mais on sent parfois l’album freiner pour garder la révélation pour plus tard, c’est-à-dire la toute fin de l’album. Rien de rédhibitoire ; juste ce petit « vous en reprendrez bien encore une page avant qu’on vous dise tout » qui aurait gagné à tomber plus tôt.

La grande famille symbiote

Le tome élargit habilement le bac à jouets : Sleeper, Toxin, Anti-Venom (Flash), et MODOK en invité surprise… On touche du doigt une « ère dorée » (littéralement) où les symbiotes re-infusent l’univers Marvel sans repartir tout de suite dans le ésoterico-cosmique. Les interactions sont savoureuses, et MODOK rappelle qu’il n’est pas qu’un perso rigolo.

Ces détours nourrissent le lore tout en servant le mystère. On comprend mieux ce nouveau statu quo, on aperçoit des lignes de force pour la suite, mais Al Ewing garde l’essentiel hors champ jusqu’à la fin : qui est All-New Venom… et pourquoi ce ton si décontracté derrière le masque ?

Le spectacle Gómez/D’Armata

Graphiquement, c’est une vitrine. Les traits nets de Carlos Gómez supportent sans broncher les transformations extrêmes du symbiote, et Frank D’Armata soigne les effets de matière (l’éclat métallique du torse doré) et les ambiances (jaunes malades, roses électriques, noirs profonds). Ça brille sans devenir clinquant, et l’action reste claire.

Quelques séquences virent volontairement au « WTF visuel » (bonjour la tête en mode gâteau surprise… Intrigué ? Allez donc voir !). C’est la signature de l’album : une horreur pop, ludique, qui assume le grand écart entre menace et cabotinage. On adhère… ou pas. Moi, j’ai souri souvent, et ce n’est pas si fréquent sur un Venom.

La révélation (sans spoiler) et le verdict

Oui, le dernier épisode du tome 1 d’All-New Venom tranche enfin : l’identité tombe, justifiée par le fil des indices, mais suffisamment audacieuse pour diviser. C’est précisément ce qu’on attend d’un bon whodunit super-héroïque : que la réponse paraisse « évidente après coup » tout en bousculant le confort du lecteur. Pari tenu.

Bilan du tome 1 : un relaunch qui fait feu de tout bois, mystère accrocheur, action créative, galerie attachante, avec deux réserves mineures (une décompression ponctuelle, une tonalité « fun » qui ne plaira pas à tous). Pour les curieux, pour les anciens fans lassés du cosmique, et pour quiconque veut un Venom qui remue vraiment la formule. All-New Venom relance la donne.

All-New Venom tome 1 est un comics publié en France par Panini Comics. Il contient : All-New Venom #1 à 5




A propos Stéphane 762 Articles
Stéphane Le Troëdec est spécialiste des comics, traducteur et conférencier. En 2015, il s'occupe de la rubrique BD du Salon Littéraire. Ses autres hobbys sont le cinéma fantastique et les jeux. Enfin, et c'est le plus important : son chiffre porte-bonheur est le cinq, sa couleur préférée le bleu, et il n’aime pas les chats.