Color Out of Space : Nicolas Cage face à la Couleur tombée du ciel dans l’adaptation moderne et réussie d’un chef d’œuvre de HP Lovecraft !

Au pays de Lovecraft

Les Gardner se sont installés au vert dans la campagne reculée de la Nouvelle-Angleterre, non loin de la ville d’Arkham, pour échapper au stress de la vie urbaine. Nathan Gardner (Nicolas Cage) élève des alpagas. Theresa, son épouse, se remet d’un cancer tout en travaillant à distance, du moins quand la connexion internet vacillante lui permet. Leur fille, Lavinia, s’adonne à la pratique de la sorcellerie wicca, tandis que Benny, son frère, passe un peu trop de temps à fumer de l’herbe et que son petit frère s’isole. Coupés du monde, les Gardner se sont liés d’amitié avec Ezra, un ermite. Leur quotidien est alors bouleversé par le crash d’un météore sur leur propriété. Surprise : la pierre extraterrestre disparait rapidement. Problème résolu ? Pas vraiment : bientôt des plantes inconnues commencent à pousser à la périphérie du lieu du crash. Peu à peu, les Gardner commencent à souffrir de maux de crane ou d’absences…

 

Color out of Space Couleur tombée du ciel Nicolas Cage Richard Stanley
(image © SpectreVision)

 

La contamination vient de l’espace

Color Out of Space, c’est l’histoire d’une contamination très localisée, quasiment à huis-clos. L’étrange météorite infecte peu à peu son entourage. Flore, faune, humains : rien ne semble échapper à l’influence morbide de cette « chose » tombée littéralement du ciel. Les animaux adoptent un comportement curieux. Et chez les Gardner, famille déjà dysfonctionnelle, les relations se tendent. Richard Stanley réussit le pari de film cette infection progressive du vivant. Par petite touche, les paysages sont progressivement envahis par des plantes aux couleurs étranges. Et si les Gardner n’y prêtent pas attention, c’est qu’ils sont absorbés par des hallucinations morbides. Et Richard Stanley de filmer des visions sanglantes. Richard Stanley injecte alors certains stéréotypes du film d’horreur : le petit garçon qui parle à des amis imaginaires ou qui dessinent ses visions forcément prémonitoires. L’évier qui se remplit de sang (presque une citation du film The Cult, déjà une adaptation de la nouvelle de Lovecraft). Parfois, ça fonctionne moins bien comme une cérémonie occulte qui tombe un peu de nulle part, plus prétexte à placer le Necronomicon à l’écran qu’autre chose. Du classique, certes, mais qui peut rassurer le spectateur contemporain peut-être en mal de repères dans une histoire inhabituelle.

 

Color out of Space Couleur tombée du ciel Nicolas Cage Richard Stanley
(image © SpectreVision)

 

Envahir l’écran, les corps et les esprits

Une chose est certaine : Richard Stanley croit en son projet et, malgré de nombreux aménagements de l’histoire, transpose la nouvelle de Lovecraft avec respect. Lettre d’intention évidente : Color Out of Space s’ouvre et se ferme sur des extraits de La Couleur tombée du ciel. Mais Richard Stanley ne se limite pas qu’à la citation servile. Certain de la puissance de la nouvelle, il déploie un lent rouleau compresseur qui vient progressivement écraser la famille Gardner. Il n’y aucune échappatoire possible : Richard Stanley ne laissera pas ses personnages s’en tirer à bon compte. L’horreur provient du fait que la « couleur » s’insère partout dans l’environnement : la terre, les arbres, ou même la télévision. Et finit forcément par s’insinuer dans l’esprit des personnages. Richard Stanley maintient la structure globale et les moments-clés de La Couleur tombée du ciel, avec une dernière partie riche en moments horrifiques et graphiques dans le grenier familial qui restera longtemps en tête. Et la fin, très attendue, ravira probablement les amateurs du Maître de Providence par son respect de la nouvelle originelle. [suite de l’article page suivante]

 

Color out of Space Couleur tombée du ciel Nicolas Cage Richard Stanley
(image © SpectreVision)

 

 

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A propos Stéphane Le Troëdec 628 Articles
Stéphane Le Troëdec est spécialiste des comics, traducteur et conférencier. En 2015, il s'occupe de la rubrique BD du Salon Littéraire. Ses autres hobbys sont le cinéma fantastique et les jeux. Enfin, et c'est le plus important : son chiffre porte-bonheur est le cinq, sa couleur préférée le bleu, et il n’aime pas les chats.