Captain Marvel : le débat de la rédac’ de Top Comics

Un film féministe ?

SLT : Captain Marvel a été vendu comme un film féministe. Au final, qu’en avez-vous pensé ?
BW : C’est un film féministe, mais qui ne vise pas à avoir un propos féministe. C’est un film féministe parce que le studio le plus puissant et populaire actuellement met en avant, porte, produit et organise un film sur son personnage le plus puissant… Et c’est une femme. C’est en ça que Captain Marvel est féministe, car le MCU fait de son « plus puissant » une femme. Évidemment, Captain Marvel n’est pas le « premier » film sur une héroïne ; on a vu plus récemment encore Rogue One, et Ripley d’Alien a beaucoup lancé. Mais c’est la 1re et vraie fois qu’un studio au faite de sa gloire soutient et lance une héroïne comme « cœur » de son futur univers (les rumeurs évoquent une signature pour 7 films de Brie Larson ; Chris Evans aurait signé pour 9, jadis). Après, j’ai particulièrement apprécié que le film ne « vise » pas ce propos féministe. À la différence de Wonder Woman, que j’ai vraiment aimé, le personnage ne se définit pas en 1er comme une femme. Diana est une femme guerrière, qui entend pacifier le monde des hommes ; Carol n’est pas comme ça. Carol est un personnage rabaissé, manipulé, spolié de sa vie et de sa mémoire, qui prend son indépendance en rejetant ses bourreaux, et en refusant de leur prouver quoique ce soit. Le film ne met pas en avant le fait que Carol est une femme – le film raconte une histoire ultra-populaire et qui peut parler à beaucoup, via un personnage auquel on peut s’identifier ; et il s’avère que c’est une femme. Voilà. Je trouve ça beaucoup plus fin, beaucoup plus sobre, mais finalement très efficace pour le statut de la femme. Il est utile d’avoir un Wonder Woman où le personnage assume son statut féminin ; il est tout aussi utile d’avoir un Captain Marvel, où l’histoire se concentre sur le personnage pour le construire sans faire de sa féminité un élément incontournable de son statut. Pour faire avancer les choses, ça a un effet plus « doux », mais plus profond. En ce sens, Rogue One avait déjà ouvert la voie, d’ailleurs.
DOOP : Il n’y a pas de propos féministe à outrance et c’est ce que j’ai aimé dans le film. Captain Marvel ne joue pas là-dessus et c’est très bien. Ça aurait été très très lourd sinon. Après, on n’évite pas la parabole un peu guimauve sur les réfugiés mais dans l’ensemble, c’est pas trop lourd. Et on a évité aussi les passages chantés ! 😀 La grande mode du moment !
SLT : Et on a aussi évité la relation romantique !
BW : Oui, c’est d’ailleurs surprenant. De mémoire, chaque personnage Marvel a un intérêt amoureux : Tony/Pepper, Cap’/Peggy/Sharon, Thor/Jane/Valkyrie, Bruce/Betty/Natasha, Scott/Hope, Strange/l’infirmière, Black Panther/Nakia. Mais pas Carol. Et ce n’est pas un mal, car finalement toute l’histoire se passe en environ 24 h (22 h pour que la Starforce arrive sur Terre), c’est trop peu. Et l’univers militaire ne poussait pas à la romance. Captain Marvel, le Rebelle/Brave de Marvel ? Pour faire une comparaison Disney sur l’absence de romance, mais aussi le propos d’indépendance d’un personnage maltraité/obligé par un poids sociétal/martial d’agir différemment de son cœur.

(image © Marvel Studios)

SLT : Pour être honnête, je me suis tout de même demandé à un moment si le film n’allait pas développer l’idée d’une relation amoureuse entre Maria Rambeau et Carol Danvers.
BW : Ah, je n’ai pas eu cette impression. Ça aurait pu, mais je n’ai pas senti les indices. Marvel n’a surement pas voulu en faire trop, trop vite.
SD : Si seulement, ce serait chouette. Le propos est sans nulle doute féministe mais c’est plutôt bien amené, même si cela n’a pas empêché quelques masculinistes bas du front de hurler au scandale. Mais quoi de plus normal que de mettre une héroïne féminine en avant, Marvel le fait depuis des décennies, c’est ne pas le faire qui aurait été choquant et ça ne vient pas très tôt non plus. Le combat entre Carol et Yon-Rogg montre bien la parabole de la libération de la femme face aux carcans masculins. Son émancipation passe aussi par le rejet de la société kree et de ses valeurs qui l’ont bridée. Quand elle réalise que son potentiel n’est pas dû aux Krees mais qu’au contraire, ils l’étouffent, c’est aussi une métaphore de la libération de la femme qui s’émancipe d’une société patriarcale.
SLT : Ce duel final est particulièrement intéressant. En proposant à Carol un combat à mains nues, Yon-Rogg ramène dans le film des codes du cinéma d’action viril des années 80-90. En refusant de tomber dans l’embuscade que lui tend Yon-Rogg, Carol envoie un message clair : les temps ont changé et les femmes se sont émancipées. Le film Captain Marvel ne suivra pas les codes établis. Et bam, elle dégomme son ancien-chef. Effectivement, elle n’a « plus rien à lui prouver » et ne va pas se plier aux anciens codes.
BW : Oui. Et ça fait du bien au spectateur, aussi : les grands discours avant les duels physiques, c’est lourd ; couper ça, c’est cool. Surtout qu’on peut y voir une référence à Indiana Jones !
FA : Brie Larson était malade elle aussi ? :p La fameuse scène d’Indiana Jones et les aventuriers de l’arche perdue est dû au fait que Harrison Ford était malade et qu’il a demandé à écourter la scène. Bilan un coup de pistolet et c’était terminé.
BW : En fait, Brie Larson était malade du machisme ambiant !
DOOP : J’ai trouvé ce point-là un peu lourd en fait. C’est ce que je pourrais reprocher au film. Je pense que le propos aurait été beaucoup mieux amené si cette « bataille » finale avait eu lieu après un ou 2 moments épiques. Je comprends l’idée, mais la réalisation, encore une fois, rend le truc plat. J’ai vraiment un problème avec ça.
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