Batman – Anarky : le Détective s’enfonce dans le pire de l’âme humaine !

Avec Batman : Anarky, Francis Manapul et Brian Buccelato livrent 2 sagas intenses, des enquêtes sur l’aspect intime et social de Gotham City. Un album aux grandes qualités graphiques et d’écriture avec un personnage d’Anarky  malheureusement pas aussi bien traité qu’on ne l’aurait voulu.
■ par Ben Wawe

 

 

Une nouvelle drogue circule dans Gotham City : l’Icare. Elle est commercialisée par les Rois du Soleil, nouveau gang qui profite de troubles locaux pour s’imposer. Ils travaillent difficilement avec le gang du Calmar, déjà installé en ville. Le frère du Calmar, Jonny, multiplie les bêtises, alors que Batman tente de limiter la propagation de la drogue. Bruce Wayne collabore, lui, avec Elena Aguila, qui veut rénover et sauver le front de mer. La détermination et son amour pour sa fille Annie touche tellement Bruce Wayne qu’il accepte de s’impliquer. Mais Elena est tuée par overdose d’Icare. Ce qui provoque une enquête autant de Batman que de Harvey Bullock, persuadé que Bruce est responsable. Ces personnages vont s’affronter, provoquer bien des drames en ville avant un final étouffant !

 

 

Anarky

Jeb Lester, employé des Entreprises Wayne déjà impliqué dans le trafic d’Icare, est tué par le mystérieux Anarky. Harvey Bullock mène encore l’enquête, toujours sûr que Bruce Wayne cache quelque chose. La Tour Wayne manque d’exploser sous une attaque d’Anarky, qui se veut le héraut des pauvres et pourfendeur du capitalisme. L’intrigue s’intéresse aussi au Chapelier Fou, ici pervers sadique obsédé par Alice. Il est responsable des meurtres de jeunes adolescents, après des abus atroces. Batman doit trouver des réponses dans tout cela, alors que le conseiller municipal Sam Young se lance pour conquérir la Mairie.

 

 

Des sagas anciennes et autonomes

Batman Anarky n’est pas une production récente, mais elle n’en est pas moins une saga de grande qualité. Les auteurs Brian Buccelato et Francis Manapul reprennent la série Detective Comics en avril 2014, après leurs prestations sur Flash période DC Renaissance. Ils remplacent le scénariste John Layman, qu’Urban Comics a publié dans Empereur Pingouin et Jours de colère. Batman Anarky est donc une suite logique, dans la continuité de ces oneshots de haut niveau. Batman Anarky prend place après la mort de Damian Wayne, avec plusieurs rappels au deuil de Bruce. Mais les auteurs s’acharnent surtout à raconter de bonnes histoires, et le font bien.

 

 

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Enquêtes musclées

Avec Anarky, Brian Buccelato et Francis Manapul prennent au pied de la lettre le nom de leur série : leurs numéros de Detective Comics sont bien des intrigues policières. Et ça fait du bien ! Les auteurs montrent vraiment le suivi des pistes et indices par Batman, mais aussi Harvey Bullock. Ce flic bourru n’est pas toujours bien utilisé, mais il est un formidable contrepoint au Chevalier Noir dans les affaires. Les 2 sagas de ce tome sont bien des enquêtes puissantes, avec beaucoup de nervosité, du dynamisme et surtout finalement peu de supervilains. C’est rafraichissant, et surtout bien mené.

 

 

Un fond social important

Les scénaristes préfèrent confronter Batman aux crispations sociales de sa ville, plutôt qu’à ses supervilains. Même si le Chapelier Fou est présent, il est plus un monstre pervers qu’un criminel costumé ; ça fonctionne complètement. Brian Buccelato et Francis Manapul s’intéressent à la misère sociale du front de mer, aux ravages de la drogue et des abus pédophiles, aux victimes oubliées, à la rage face au capitalisme sauvage. Batman doit empêcher le pire, mais se confronte moins à de purs criminels qu’à des victimes qui ont trop souffert. Batman : Anarky est une œuvre sociale profonde, qui confronte le superhéros au pire de l’âme humaine. Lecture dure mais passionnante.

 

 

 

La déception Anarky (attention : spoilers !)

Abordons cependant le point noir de l’ensemble : Anarky. Brian Buccelato et Francis Manapul l’évoquent discrètement dans Icare, puis l’abordent plus directement. Hélas, si l’histoire est bonne et intense, le personnage d’Anarky est loupé. Anarky est initialement Lonnie Machin, créé par Alan Grant en novembre 1989. Le scénariste britannique narre quasiment toutes les apparitions de cet antihéros, autant un ennemi qu’un allié inattendu de Batman. Anarky est utilisé comme incarnation du discours anarchique, Alan Grant s’en sert pour des discours sociaux et politiques forts. Sauf que Batman : Anarky n’en reprend rien. Anarky a des messages TV révolutionnaires, mais c’est un leurre pour se venger du Chapelier Fou. Anarky n’est pas Lonnie Machin (qu’on voit, cependant, en sbire). Mais le conseiller Sam Young, dont la sœur est tuée par le Chapelier. Batman : Anarky propose ainsi un ersatz d’Anarky, version de 2^nde  main qui a peu d’intérêt. Décevant, alors que l’enquête de fond est passionnante.

 

 

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Des graphismes magnifiques pour un album intense

La particularité de Batman : Anarky est que ses scénaristes dessinent aussi l’essentiel des numéros. Francis Manapul est un artiste formidable, assisté du coloriste Brian Buccelato. Ils livrent des planches magnifiques, à couper le souffle. Les illustrations sont superbes, les double-pages énormes, et l’ambiance est complètement adaptée aux intrigues policières. La narration fluide donne une allure parfaite, un ensemble extrêmement positif. Un numéro est cependant réalisé par Werther Dell’Edera, Jorge Fornés et Scott Hepburn, en conclusion à Icare sous forme de prologue. C’est clairement moins beau et puissant, mais encore correct. Batman : Anarky dispose d’un graphisme léché, au service de 2 sagas denses et touchantes. Une belle réussite pour un Batman détective, qu’il est agréable de retrouver. ■

Batman Anarky est un comics publié en France par Urban Comics.

 

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