The Department of Truth n°1 : Et si les complots devenaient la réalité ?

department of truth
(image © Image Comics)

Avec The Department of Truth, le scénariste de comics James Tynion IV s’intéresse au phénomène inquiétant des complotistes, et livre un 1er épisode intriguant et accrocheur, aux frontières du réel avec un univers graphique très marqué. Prometteur !
■ par Stéphane Le Troëdec

 

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(image © Image Comics)

 

L’agent spécial du FBI Cole Turner est un professeur de l’école de Quantico spécialisé dans les théories du complot et les groupuscules d’extrême droite. Au tout début de The Department of Truth, Cole Turner est interrogé par un étrange personnage qui travaille pour une mystérieuse organisation gourvernementale, le « Département de la Vérité » du titre. En effet, cette dernière s’intéresse tout particulièrement à une conférence récemment organisée par des « platistes », ces complotistes persuadés que la Terre n’est pas ronde, mais plate. Cole Turner explique qu’au cours de cette convention, il rencontre 2 hommes richissimes, Kenneth et Bertram Boulet. Ceux-ci ont la réputation d’avoir alimené internet depuis des années de complots en tous genres. Mais Cole découvre bientôt qu’ils semblent posséder un inquiétant pouvoir : si suffisamment de personnes croient en leur théories complotistes, ils seraient capables de rendre bien réel les complots les plus délirants …

 

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Visuellement, un cauchemar éveillé

La 1re chose qui frappe quand on feuillète The Department of Truth, c’est bien l’ambiance graphique qui s’en dégage. L’artiste Martin Simmonds déploie un dessin loin des standards du mainstream. Son trait nous transporte dans une ambiance nébuleuse, cotonneuse, comme si nous plongions dans un rêve éveillé. Quelque chose qui évoquerait l’atmosphère du Mulholland Drive de David Lynch, mais version bande dessinée. Un rêve qui peut vite basculer dans le cauchemar. Au détour d’une case, l’horreur peut surgir par un détail a priori insignifiant, anodin, comme des sourires trop carnassiers, ou un joli minois aux yeux barrés d’inquiétantes croix noires. Le style de Martin Simmonds rappelle au lecteur celui de Bill Sienkiewicz ou d’Ashley Wood, par exemple. D’entrée de jeu, The Department of Truth impose un visuel fort, avec du caractère, qui pousse à s’intéresser à cette étrange histoire. Il faut aussi souligner aussi le gros travail sur les bulles de texte d’Aditya Bidikar, qui participe à installer cette atmosphère étrange.

 

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James Tynion IV, le scénariste de Batman qui monte

James Tynion IV est un scénariste qui,depuis quelques années, s’installe dans le paysage des comics, doucement mais sûrement. On le retrouve dans le comics mainstream – lire le récent Batman : Joker War chez Urban Comics – mais aussi un peu dans le comics indé avec une belle tendance pour les comics d’épouvante comme par exemple Something is killing the children (toujours chez Urban) mais aussi The Woods chez Ankama. La plupart des lecteurs le connaissent évidemment pour ses travaux chez DC Comics et ses nombreuses collaborations avec Scott Snyder. Sur The Department of Truth, il travaille en solo.

 

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Des théories du complot en pagaille mais heureusement pas mal de recul sur le sujet

The Department of Truth s’amuse évidemment des nombreuses théories du complot. Il en existe des centaines, et dès ce n°1, James Tynion IV s’amuse à lister les plus connues, de l’assassinat de JFK à la Terre plate en passant par le pas de Neil Armstrong sur la Lune tourné en studio. Mais le scénariste ne s’en amuse pas longtemps et sonne très vite la fin de la récréation. Hors de question de montrer le complotisme sous un jour attrayant. L’histoire analyse froidement et en quelques cases, pourquoi le complot est une idée si séduisante. The Department of Truth est aussi une histoire sur l’équilibre subtil entre le pouvoir et l’information. La manière dont on peut utiliser une information, la détourner, pour prendre le contrôle d’autres êtres humains.

 

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(image © Image Comics)

 

Un 1er épisode de The Department of Truth très prometteur

Le n°1 de The Department of Truth effleure délicatement son sujet, et laisse volontairement pas mal de questions de côté. Par contre, l’ambiance est vraiment bien posée, au détriment de l’action, minimaliste. On pense à David Lynch, on l’a déjà dit, mais aussi à des influences comme The X-Files mais aussi le jeu de rôle Mage l’Ascension. Mais surtout, on sent que les auteurs en ont sous la pédale ! Un sentiment renforcé par la dernière page couperet qui donne vraiment envie de plonger dans ce monde étrange et mystérieux ! The Department of Truth est donc sacrément prometteur : on attend déjà le n°2 de pied ferme ! ■

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(image © Image Comics)

The Department of Truth n°1 est un comics publié aux États-Unis chez Image Comics.




A propos Stéphane Le Troëdec 628 Articles
Stéphane Le Troëdec est spécialiste des comics, traducteur et conférencier. En 2015, il s'occupe de la rubrique BD du Salon Littéraire. Ses autres hobbys sont le cinéma fantastique et les jeux. Enfin, et c'est le plus important : son chiffre porte-bonheur est le cinq, sa couleur préférée le bleu, et il n’aime pas les chats.