The Wendy Project : Peter Pan au secours d’une adolescente en deuil

wendy project
(image © NBM/Papercutz)

The Wendy Project n’a pas pour ambition de révolutionner les récits sur l’adolescence mais de proposer un traitement original du thème du deuil tant sur le fond que sur la forme. Déconcertant, The Wendy Project amène à réfléchir au fur et à mesure qu’approche la conclusion et mérite une relecture pour s’imprégner d’une ambiance étonnante.
■ par Fletcher Arrowsmith

 

Wendy, une ado de 16 ans, est victime un grave accident de voiture. À son réveil, elle apprend qu’un de ses frères souffre de graves séquelles. Et le corps de son autre frère, Michael, a disparu. Se sentant responsable, Wendy se réfugie dans un monde imaginaire. Elle va suivre une thérapie en dessinant ce qui lui passe par la tête dans un cahier.

 

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(image © NBM/Papercutz)

 

Un drame puis un deuil impossible

Nouvelle venue dans le monde des comics, Melissa Jane Osborne fait preuve d’une maturité impressionnante dans la construction du roman graphique The Wendy Project autant sur la forme que sur le fond. Dès les 1res pages, The Wendy Project attaque dans le dur avec un accident de voiture au bilan très lourd. En tant que conductrice (aux États-Unis, on peut conduire à partir de 16 ans), Wendy vit un traumatisme sans précédent. Elle doit s’imaginer continuer à vivre avec ce poids sur la conscience. Pire le corps de Michael étant introuvable, le deuil commence avec un cercueil vide. Ce que Wendy, jeune adolescente sans problème et surtout assez rationnelle, ne peut envisager.

 

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(image © NBM/Papercutz)

 

Le dessin comme thérapie

Les parents de Wendy la font suivre par un psychologue qui lui conseille d’imager ses pensées dans un carnet. Le résultat, le lecteur le tient entre les mains car The Wendy Project se présente comme un carnet de croquis représentant le parcours de Wendy dans son acceptation du deuil. D’où des planches en forme de roughts, d’esquisses avec des touches de couleurs, rares. Afin de nous faire comprendre les troubles de Wendy, Melissa Jane Osborne projette l’imaginaire de la jeune lycéenne dans le mode imaginaire crée par J.M. Barry, celui de Peter Pan. Dans la vie de tous les jours, Wendy en arrive à confondre la réalité avec son imagination. Pour se soigner, Wendy dessine, couche ses pensées et décrit ses journées sur un cahier qui lui est propre, un cahier de son imaginaire où Peter, Wendy et les enfants perdus comme son frère prennent forme. Au lieu d’être de chair, ils sont faits de coups de crayons.

 

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(image © NBM/Papercutz)

 

La dureté de l’adolescence

Avec The Wendy Project, grâce à la pertinence du thème du deuil, Melissa Jane Osborne expose de façon pertinente les difficultés de l’adolescence et nous fait vivre les émotions à vif des adolescents. Le roman de J.M. Barry parle du refus de grandir et de rester dans l’innocence de l’enfance. L’adolescence représente justement cette phase transitoire et Melissa Jane Osborne l’illustre en déclinant l’univers de Peter Pan. Devant un tel drame, dont elle a légitimement du mal à accepter les conséquences, Wendy se réfugie alors dans un monde imaginaire.

 

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(image © NBM/Papercutz)

 

Deuxième étoile à droite

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C’est normal que le corps du frère de Wendy a disparu, il se trouve dans le monde imaginaire. Et qui est ce Peter croisé au lycée ? Un policier ou le Capitaine Crochet ? Les codes de Peter Pan sont subtilement employés et distillés tout le long du récit. Grâce aux esquisses de Veronica Fish, reflets des dessins de Wendy, le lecteur perçoit les troubles de la jeune conductrice pour mieux les comprendre ou s’y perdre. En effet, la lecture de The Wendy Project reste déconcertante. Tout comme Wendy, le lecteur semble hésiter sur la compréhension de ce qui voit dans ce cahier. L’histoire ne se veut pas linéaire et les différentes planches déconcertent dans leurs approches déconstruites. Pas de cases ou de gaufriers mais des esquisses d’une adolescente perturbée. La frontière entre l’imaginaire et la réalité est mince. Bien évidemment, le lecteur doit accepter de rentrer dans le jeu. Tout d’abord, dans le choix de la forme de The Wendy Project. Plus qu’une BD il prend la forme d’un cahier à des fins thérapeutiques. Lire The Wendy Project c’est accepter d’ouvrir le cahier secret de Wendy, celui où elle décrit ses troubles, ses pensées intimes. Puis il faut se laisser guider vers l’inconnu, dans des planches difficiles d’accès à l’instar de l’état d’esprit de Wendy. Enfin The Wendy Project se lit comme une relecture de Peter Pan dont la réinterprétation, parfois dure, nous rappelle les moments magique de notre enfance et surtout du merveilleux.

 

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(image © NBM/Papercutz)

 

La dessinatrice d’Archie revient de façon surprenante chez les adolescents

La dessinatrice Veronica Fish est une habituée des personnages adolescentes ou féminins puisque nous l’avons déjà croisé sur Spider-Woman, Spider-Gwen, Silk ou encore les héros d’Archie. Déjà habitué des formats roman graphique indépendants à l’instar de Geeks & Greeks (Relentless Goat Productions) ou Dracula : The Dead Travel Fast (McFarland Press), Veronica Fish déploie une facette de son talent loin des standards mainstream Marvel parfaitement adaptée à cette variation de l’univers fantastique de Peter Pan. Les dessins de Veronica Fish sont dynamiques, l’absence de construction et de lignes claires renforçant la spontanéité de Wendy. Pratiquement toujours sur des tons gris et noir et blanc, symbolisant la réalité, les planches de The Wendy Project s’animent comme par magie sous l’effet de touches colorées soudaines et salutaires. ■

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(image © NBM/Papercutz, ankama)

The Wendy Project est un comics publié en France chez Ankama.

 

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(image © Avery Hill Publishing)