La relance DC Rebirth de Green Arrow vise à réinstaller le personnage dans une position proche de celle antérieure à sa réinvention dans DC Renaissance. Après avoir recréé une romance avec Black Canary, Benjamin Percy poursuit sa grande saga personnelle, mais surtout la reconstruction de plusieurs pans d’une continuité en jachère.
■ par Ben Wawe
Benjamin Percy est l’auteur qui a relancé Green Arrow dans DC Rebirth, mais il était déjà intervenu à la fin du volume précédent. Il a pris la suite de Jeff Lemire, dont les intégrales Green Arrow 1 et 2 demeurent le point positif de DC Renaissance sur l’archer. Benjamin Percy maitrise définitivement le titre depuis cette relance, et dans ce tome 4 poursuit son plan : mener une immense saga, pour divertir et reconstruire la continuité de Green Arrow !
Refaçonner l’archer et son univers
Oliver Queen s’inspire initialement de Batman : justicier milliardaire, avec un jeune acolyte, Arrowplane, Arrowcave, etc. Green Arrow s’en est détaché dans les années 60 et 70, sous l’influence notamment de Denis O’Neill et Neal Adams (voir Green Arrow and Green Lantern). Il est devenu le héraut des thèmes sociaux dans l’univers DC, avec un sacré caractère et de nombreux mauvais choix. Cependant, la période DC Renaissance l’a privé d’acquis fondamentaux, que Benjamin Percy réintroduit… en les conciliant avec quelques bonnes idées récentes. Sa sœur Emiko (apparue dans la saison actuelle de la série TV Arrow) et l’idée d’une « Team Arrow » autour de l’archer demeurent, alors que le scénariste s’acharne à remettre en ordre le carquois de l’archer.
Éclaircir la relation mentor/élève
Le Green Arrow de DC Renaissance étant jeune et explosif, difficile de l’imaginer en conflit avec un ancien apprenti. Mais Roy Harper/Arsenal apparait pourtant dans Red Hood & the Outlaws. Comme la majorité des Titans originaux, Arsenal conserve de nombreux fans, mais sa présence est difficile à concilier avec le jeunisme de DC Renaissance. Benjamin Percy livre des explications sur son origine et sa brouille avec Oliver dans la saga « Le retour de Roy Harper ». L’auteur a l’intelligence de conserver les fondements des histoires originales, comme l’enfance de Roy dans une réserve amérindienne et ses addictions. Il n’y a pas de bon et de mauvais entre Oliver et Roy, tous 2 ont des torts et des caractères qui gênent la réconciliation. Si tout n’est pas aussi réussi que dans les histoires originales, la lecture est très agréable. Elle a surtout l’avantage d’éclaircir la relation mentor/élève, ce qui était attendu depuis plus de 7 ans.
L’ambition Star City
Dans les 4 numéros de « The Rise of Star City », Benjamin Percy joue à l’équilibriste, entre passéisme et nouveautés. Il doit autant respecter l’implantation des Queen et de Green Arrow dans Seattle depuis DC Renaissance, qu’ouvrir sur Star City, qui semble être son « futur ». Un comble, car historiquement l’archer a protégé Star City avant de s’établir à Seattle dans les années 80 ! Benjamin Percy livre un récit dense, surfant sur les points forts de la franchise : les mystères et manipulations des Queen dans une ville agonisante (thèmes de la série TV Arrow), l’égocentrisme et la certitude d’Oliver de pouvoir gérer seul, et finalement le héros seul contre tous. Il amène Green Arrow au bord d’un précipice, où il plonge dans le numéro « Flèche brisée », qui conclue l’histoire autant qu’il ouvre sur la suite. Une chute menant à la rédemption, peut-on dire. Un procédé classique, mais efficace.
Des récits inégaux, mais sincères
Le retour de Roy Harper s’insère difficilement dans la grande saga de Benjamin Percy sur Seattle et le Neuvième Cercle, grand adversaire de l’archer. L’histoire est indispensable pour les personnages, mais sa présence n’est pas fluide ici. Dommage, surtout que les dessins d’Eleonora Carlini et Mirka Andolfo ne sont pas non plus à la hauteur. Juan Ferreyra gère « Star City » et Otto Schmidt fait « Flèche brisée », et ils œuvrent sur le titre depuis la relance Rebirth. S’ils livrent tous deux de très belles planches, E. Carlini et M. Andolfo sont un cran en dessous… et ça dessert cette histoire sympathique, mais mal placée. Les 2 autres sagas souffrent aussi de quelques défauts, notamment le gigantisme du plan ennemi, et la facilité de sa réussite. On sent aussi que Benjamin Percy veut absolument concilier 3 personnages : le Green Arrow historique, celui de DC Renaissance et même celui de la série TV Arrow. Ça « passe », mais ça « casse » parfois sur les bords. On ne peut retirer en tout cas la sincérité du projet, et les moyens importants en termes d’intrigues pour y arriver. L’effort est à souligner, d’autant qu’il touche la cible : le cœur des lecteurs, qui peuvent apprécier ces efforts et les clins d’œil à la continuité. Benjamin Percy continue de maitriser Green Arrow et son casting, en suivant le cahier des charges de la reconstruction de la franchise. Si tout ne fonctionne pas toujours, l’ensemble est très solide et parle suffisamment aux lecteurs pour que la lecture en soit agréable. Vivement le prochain tome, pour voir si la suite fera aussi mouche ! ■