Quand un éditeur met en avant les travaux indépendants d’un artiste connu, soit il s’agit d’une œuvre d’art, soit d’un travail alimentaire relativement passable. Du quitte ou double, en somme. Avec VS, c’est du quitte, mais façon « quittez tout » !
■ par Dragnir
Le futur est sombre et inhumain. Des consortiums économiques puissants détiennent le pouvoir et s’affrontent au travers de jeux de guerre diffusés comme des shows télévisés. Des armées entières portant les couleurs des grandes firmes s’entretuent allègrement pour le plus grand plaisir des foules dont les puissants gardent le contrôle. La fameuse formule « du pain et des jeux » versions guerre high tech en somme. Parmi les guerriers star, il y a Satta Flynn. Implacable tacticien hors pair, sa soif de combat n’égale que sa volonté d’être le meilleur, la plus grande vedette ! Mais comme pour de nombreux athlètes, le gladiateur vieillit et voit bientôt apparaitre de nouveaux combattants qui lui dament le pion. Gravement blessé au combat, Flynn va voir sa cote de popularité s’effondrer au point que ses sponsors lui retirent les membres artificiels qui lui étaient fournis. Le vieux guerrier pourra-t-il remonter la pente ?
Rien de bien neuf
Que ce soit en littérature au cinéma ou même dans le domaine qui nous est cher qu’est le comics, le concept de spectacle sanglant pour contrôler le peuple est un classique. Je pense au fantastique film Rollerball de Jewison, à l’excellent roman Wang de Pierre Bordage, au comics Super Boxeur de Ron Wilson ou plus proche de nous à Suiciders de Lee Bermejo. Chacun de ses traitements est fait selon un angle de vue particulier mais a toujours pour vocation d’être une critique sociétale. S’il est vrai que certaines de ces œuvres manquent un peu de subtilité, le propos reste clair : l’emprise des systèmes dictatoriaux est proportionnelle à la violence des spectacles extrêmes et morbides qu’elle propose à des foules assoiffées de sang. En clair, on impose des conditions de vie épouvantables au peuple, et pour le contenir, il faut des spectacles « soupapes », cruels et mortifère. C’est également ce que tente de faire le scénariste Ivan Brandon avec VS mais hélas, c’est tout sauf une réussite.
Quand le dessin ne suffit pas
La trame scénaristique de VS est des plus confuses et oscille entre l’action pure et des tentatives d’Ivan Brandon d’étayer un monde avec des préceptes vus et revus sans y apporter quelques originalités que ce soit. Les personnages, y compris le héros, sont insipides , absolument pas attachants et pire que ça : ils ne laissent aucun souvenir bon ou mauvais une fois le livre refermé. Sans que ce soit clairement mauvais, le contenu de VS est donc simplement oubliable. Alors, bien sûr il y a Esad Ribic. C’est d’ailleurs un des arguments de vente de l’éditeur Panini Comics : « La 1re série indépendante d’Esad Ribic ». Et bien c’est la démonstration même que pour qu’un comics soit bon, le seul dessin ne suffit pas. Je vais même aller plus loin : certaines histoires inspirent les artistes au point qu’ils se transcendent et livrent leurs plus grandes réalisations. À l’inverse, des récits moyens ne leur permettent que peu d’expression. C’est exactement le cas avec VS. On n’ira pas jusqu’à dire que le travail d’Esad Ribic est mauvais mais si l’on compare avec son Thor par exemple, force est de constater que l’on n’est pas du tout au même niveau. On peut donc dire que même le trait artistique du dessinateur ne rattrape pas ce rendez-vous manqué. Je dois avouer que j’avais pas mal d’attentes concernant VS mais c’est finalement une grosse déception. Le 2e tome, ce sera sans moi. ■
VS est un comics publié en France chez Panini Comics.