Scarlett : Mission Spéciale – Une infiltration sans panache ?

Temps de lecture estimée : 4 min.

Alors comme ça, on nous refourgue une mini-série G.I. Joe estampillée Energon Universe ? L’idée était plutôt séduisante : prendre Shana « Scarlett » O’Hara, personnage emblématique de l’équipe de GI Joe, et lui filer une mission solo dans ce tout nouveau cadre partagé, où se croisent désormais Transformers et Void Rivals. Un comics d’espionnage nerveux, en mode infiltration, c’était tentant. Sur le papier en tout cas. Parce qu’en vrai, Scarlett : Mission Spéciale, ce n’est pas exactement un chef-d’œuvre impérissable.

Un scénario prétexte à l’action

L’histoire de Scarlett : Mission Spéciale tient en une ligne : Scarlett est en mission, doit infiltrer un groupe louche. Surprise, sa petite amie disparue refait surface dans ce groupe. Et… voilà. Le problème, c’est que cette mission n’a rien d’exceptionnel. L’intrigue semble exister juste pour proposer des scènes d’action inspirées par les franchises James Bond ou Mission : Impossible (les premières pages sont éloquentes). Malheureusement, Kelly Thompson ne raconte pas grand-chose de marquant. Elle tease vaguement quelques éléments pour la future série GI Joe (du moins c’est ce que j’imagine), mais en l’état, c’est un comics qui se lit et s’oublie dans la foulée. Dommage, parce qu’avec une espionne de ce calibre, il y avait moyen de faire un techno-thriller plus haletant.

Un lien artificiel avec l’univers Energon

Si vous pensiez voir Scarlett croiser des autobots en cavale ou récupérer un artefact cybertronien de la série Transformers, repassez plus tard. Les connexions à l’univers Energon sont tellement plaquées que le script aurait très bien pu être retouché à la dernière minute pour coller à la franchise. On nous sort bien une épée d’Energon, histoire de faire genre, mais cela fait plus gadget scénaristique qu’autre chose. Dommage que cette Scarlett ne soit pas plus connectée aux autres titres de l’univers Energon.

Scarlett à la rescousse

Le point positif ? C’est que Scarlett reste fidèle à elle-même. Kelly Thompson sait écrire le personnage et nous rappelle pourquoi elle est l’une des agentes les plus redoutables de GI Joe. Elle est maligne, efficace, toujours prête à retourner une situation. Ça, au moins, c’est bien fait. Mais encore une fois, on aurait pu espérer un développement plus ambitieux. Thompson maîtrise l’essence de Scarlett : une stratège hors pair, capable d’anticiper les plans adverses et d’improviser dans les pires situations. Sa relation avec son passé est effleurée, mais manque de profondeur. On sent pourtant qu’il y avait de la matière pour un portrait plus nuancé, notamment avec son lien sentimental qui refait surface dans cette mission. On aurait aimé voir davantage de conflits internes, de doutes, ou même une tension plus marquée entre son devoir et ses émotions. Bref, Scarlett brille, mais son écriture aurait mérité une dose supplémentaire de subtilité et de complexité.

Des dessins en dents de scie

Visuellement, ce n’est pas une catastrophe, mais c’est pas fou non plus. Certains plans sont jolis, et Marco Ferrari s’en tire bien sur certaines scènes de dialogues ou intimes. Mais dès qu’il y a des combats, ça se complique. Si le dynamisme est bien là, Marco Ferrari semble avoir des difficultés à représenter les combattants. L’ensemble manque de personnalité : ça fait le job, sans plus. Pour un titre d’action et d’espionnage, ça aurait mérité une mise en scène plus pêchue, plus tendue. Là, on est parfois sur du statique un peu plat.

Le point faible de ce début d’univers Energon ?

Il fallait bien que ça arrive : parmi les séries du Energon Universe, Scarlett: Mission Spéciale est clairement la moins convaincante. Pas mauvaise, juste trop fade pour être mémorable. Le souci vient du fait que tout semble trop superficiel, comme si le scénario ne voulait pas prendre le risque d’explorer des pistes plus ambitieuses. Le rôle de Scarlett, bien que fidèle à ce que l’on attend d’elle, manque de complexité. On la voit se battre, se tirer de mauvais pas, mais jamais réellement être mise à l’épreuve émotionnellement ou intellectuellement. On sent bien qu’il y avait des idées en germe, mais elles restent sous-exploitées, donnant l’impression d’un récit sans réelle conséquence sur l’univers qui l’entoure.

En comparaison avec les autres titres du Energon Universe, qui posent des bases solides pour une mythologie commune, Scarlett: Mission Spéciale peine à trouver sa place. Elle pourrait exister sans cet univers partagé et ça ne changerait pas grand-chose. C’est d’ailleurs ce qui la rend si anecdotique : elle se lit vite, s’apprécie sur le moment, mais ne laisse aucun impact durable. Un one-shot qui se contente du minimum syndical et qui, en fin de compte, donne plus l’impression d’être un bonus dispensable qu’un élément clé de cet univers Energon en construction.

Verdict : cette mission s’autodétruira…

Faut-il lire Scarlett : Mission Spéciale ? Si vous êtes un fan hardcore de GI Joe, pourquoi pas, mais n’attendez rien d’essentiel. De toute manière vous avez déjà lu cet album. Pour les autres, mieux vaut garder son temps (et son argent) pour les titres plus solides du Energon Universe. Allez, hop, mission suivante.

Scarlett : Mission Spéciale est un comics de 132 pages publié en France par Urban Comics. Il contient : Scarlett #1 à 5




A propos Stéphane 722 Articles
Stéphane Le Troëdec est spécialiste des comics, traducteur et conférencier. En 2015, il s'occupe de la rubrique BD du Salon Littéraire. Ses autres hobbys sont le cinéma fantastique et les jeux. Enfin, et c'est le plus important : son chiffre porte-bonheur est le cinq, sa couleur préférée le bleu, et il n’aime pas les chats.