Panini Comics publie Goodnight Paradise, un polar incroyable et original puisque son personnage n’est autre qu’un SDF de la célèbre plage de Venice Beach. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que sous le soleil de Californie, c’est une autre vision de l’Amérique que révèlent Joshua Dysart et Alberto Ponticelli. Immanquable.
■ par Stéphane Le Troëdec
Venice Beach, mais pas celle des cartes postales, non : oubliez les surfeurs et les jolies filles, ic, c’est la Venice Beach des clochards, des camés et des criminels. Un enfer en bord de plage. Eddie Quinones est un SDF paumé. Un jour, il découvre le corps d’une jeune fugueuse dans une poubelle. Eddie n’a pas de but dans la vie et personne ne semble vouloir s’intéresser à cette affaire : alors il jure de retrouver le ou les meurtriers de l’adolescente. Alors qu’il renoue contact avec son fils, l’enquête d’Eddie va le conduire dans les recoins les plus sombres du fameux rêve américain…
Un instantané d’un quartier en perdition
Avant d’être un polar rondement mené, Goodnight Paradise est la photographie d’une Amérique à la dérive comme on la voit rarement au cinéma ou dans les série tv. Le scénariste, Joshua Dysart, retranscrit à la perfection le quotidien des SDF californiens, les longues après-midis à boire en observant le monde. Les nuits dans les squats ou dans les campings cars vétustes. La drogue et la violence. Goodnight Paradise vous transporte là où vous n’êtes jamais allé, dans cet univers qu’on ne vous a que trop rarement montré, où le cadavre d’une adolescente n’intéresse personne ; où si vous n’avez pas un peu d’argent, vous n’êtes rien. Ce monde a beau être baigné de lumière et de chaleur, Joshua Dysart nous le dépeint comme un monde glacial et glaçant.
Goodnight Paradise : un polar riche et plein de rebondissement
Pour autant, Joshua Dysart n’oublie pas non plus de raconter une histoire. C’était le piège de Goodnight Paradise, se focaliser sur la peinture, la description, et oublier de rythmer l’histoire. Pas de soucis, Joshua Dysart trousse un polar riche, bourré de rebondissements, de moments tendus et flippants. D’abord parce que, vous l’aurez deviné, Eddie n’a vraiment rien d’un super-héros. Il boit, il se drogue, il n’a pas toujours les idées claires, mais il a gardé quelque chose d’essentiel : son humanité. Ensuite parce cette Venice Beach est un endroit dangereux où le danger peut surgir à tout instant, vous obligeant à rester en permanence sur vos gardes.
Un travail de préparation d’Alberto Ponticelli qui permet de transcrire la réalité
Pour illustrer ce « paradis en perdition », Joshua Dysart retrouve son équipier du comics UN3, à savoir le dessinateur Alberto Ponticelli. Sur UN3, Ponticelli avait déjà démontré sa capacité à « croquer » la réalité au plus près. Pour mieux retranscrire le quotidien de Venice Beach, le dessinateur passe du temps dans le quartier, fréquente des assos d’aide aux sans-abris. Un travail de documentation précis qui paie, puisque Goodnight Paradise transpire la crasse, la saleté, la détresse, la pauvreté jusqu’au moindre recoin de ses planches. Mais aussi l’espoir et l’humanité là où on ne les attendrait pas forcément. Les regards d’Eddie, Alberto Ponticelli les a croisés pendant ces préparatifs : le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il nous transmet ces petits éclats d’humanité avec une fulgurance sidérante et même terrassante. On ne ressort pas de Goodnight Paradise tout à fait indemne de ce polar. ■
Goodnight Paradise est un comics publié chez Panini Comics. Il contient Goodnight Paradise 1-6.
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(image © wfp.org)