La Fleur de la sorcière : un conte initiatique doux et intelligent, qui marque en démontant les clichés

 

La fleur de la sorcière
(image © 404 Comics, 404 Editions)

 

Une émotion juste dans le ton, les personnages et le style

La fleur de la sorcière n’est clairement pas de ces comics d’action pure, avec violence et explosions brutales. L’auteur Enrico Orlandi, Italien de 30 ans cette année, propose un récit initiatique qui suit un chemin prévisible mais très agréable à prendre, grâce à l’émotion qu’il injecte. Ses personnages ne sont pas unidimensionnels, tous ont plusieurs petites facettes qui les rendent crédibles et attachants. Tami n’est pas un héros parfait, il a des réactions « mauvaises » mais veut s’améliorer. L’ensemble du récit est prenant et touchant, et le style lent mais efficace parvient à mener aisément tous les thèmes jusqu’à la conclusion, forte et mature. Enrico Orlandi acte en effet le destin de Tami, en ne livrant pas un happy-end clair et définitif, mais où chaque acte a ses conséquences, même si rien n’est jamais perdu. Un récit fort de sentiments, mais qui ne verse pas dans le surplus désagréable. Une maîtrise générale très agréable.

 

La fleur de la sorcière
(image © 404 Comics, 404 Editions)

 

Un voyage initiatique intelligent et pertinent

C’est quoi, être un homme ? Voilà la question qui hante Tami et rythme tout La fleur de la sorcière. Enrico Orlandi utilise son rythme et son ton pour répondre lentement mais sûrement à cette interrogation, qui touchera assurément l’essentiel du lectorat masculin. L’auteur, au fond, s’amuse même à reprendre l’icône même de la masculinité agressive des années 2000 en évoquant 300, de Frank Miller en comics et Zack Snyder a cinéma. En effet, Tami vient d’un village où chaque garçon est exilé à 10 ans et doit revenir « homme », ce qui rappelle les Spartiates. Mais Enrico Orlandi détourne cette approche brutale, pour montrer que ce n’est pas la solution ou la voie la plus sensée. Il livre un récit initiatique qui démonte habilement les clichés habituels sur « l’homme », pour montrer que se tromper n’est pas honteux si on assume les conséquences. Et donc que la maturité ou être « homme », c’est aussi vivre avec ses faiblesses et envies. L’on peut être guerrier, mais ne pas s’y perdre ou oublier ses proches et ses envies de douceur. Cela offre une morale bienvenue, bien amenée et qui permet un contrepoids au masculinisme violent.

 

La fleur de la sorcière
(image © 404 Comics, 404 Editions)

 

Un conte puissant par sa beauté et sa simplicité, à partager

Enrico Orlandi livre, avec La fleur de la sorcière, une bande-dessinée puissante. Son dessin participe grandement au sentiment de pureté et de simplicité, car son approche directe apporte une forme d’apaisement, enclenche une douceur naturelle. Son trait est léger, doux mais d’une efficacité totale dans la narration. Une réussite graphique qui fait fonctionner le récit, plus intelligent et porteur qu’on ne l’attend. La fleur de la sorcière résonne ainsi longtemps après lecture, livrant des secrets et morales « cachés » qui peuvent impacter tout type de lecteur. Un récit surprenant, qui peut et doit être partagé entre proches, notamment les plus jeunes qui peuvent se perdre dans le cliché de la virilité masculine. Une belle œuvre qui est très bien publiée par le nouvel éditeur 404 Comics, issu de 404 Editions qui propose aussi l’étonnant Big Girls, avec ici un album broché très joli et agréable en mains. Une autre bonne raison de plonger dans La fleur de la sorcière, qui réjouit et marque son lecteur !

La fleur de la sorcière
(image © 404 Comics, 404 Editions)

La Fleur de la sorcière est un comics publié en France par 404 Comics. Il contient : The Flower of the Witch TPB.