Le folklore du sud des Appalaches est mystérieux, sombre et assez inconnue pour les Français que nous sommes. Avec ce 2ème tome de Hillbilly, Eric Powell nous ouvre à nouveau les portes d’un monde fait de superstitions. Et on voit qu’il sait traiter les ténèbres avec brillance !
■ par Dragnir
Un démon harceleur
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Les sombres montagnes du sud des États-Unis sont truffées de créatures vicieuses et Tailypo est l’une d’entre elles. Malheur à celui qui s’en prend à l’objet de son orgueil. Tailypo viendra le harcèler et lui faire perdre la tête. C’est le triste sort d’un vieil homme qui vit seul dans les bois : il a malencontreusement pris à Tailypo ce dont il est le plus fier. Pire que ça, notre ermite l’a mangé ! Mais quel est donc cet objet si précieux à la créature démoniaque ? Sa queue ! Depuis le pauvre homme a perdu ses 3 chiens tués par le monstre qui vient chaque nuit lui réclamer sa queue en chuchotant et grattant derrière sa porte. La terreur est à son comble mais fort heureusement, c’est là que le légendaire Hillbilly va intervenir.
Des contes sombres et folkloriques
Voici donc le 2ème tome de Hillbilly, la série du papa de The Goon, composé de 5 récits. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est la confirmation de ce que l’on savait : Eric Powell est un excellent conteur ! Il parvient à mettre en place une ambiance de conte horrifique d’un folklore dont nous ignorons presque tout et qui pourtant semble familière. Il y a une patte qui ressemble à celle des Frères Grimm dans leur version originale et dans les morales en demi-teinte, personne n’est vraiment innocent et les allégories sont amusantes. J’en veux pour exemple ce démon dont le bien le plus cher est sa queue et dont la symbolique n’échappera à personne. On en apprend davantage sur les liens qui unissent Rondel le Hillbilly et l’ourse Lucille mais aussi cet univers des montagnes du sud fantasmées par l’auteur ainsi que des étranges personnages qui y vivent. Fantômes, démons et shamans indiens hantent ces contrées et viennent,pour notre plus grand plaisir, nourrir la fantasmagorie qui fait le charme de cette série. C’est clairement un délice qui rappelle les grandes heures des Contes de la crypte tout en gardant une identité propre.
Un laboratoire d’idées graphiques
Si Eric Powell maîtrise parfaitement son sujet côté scénario, qu’en est-il côté graphisme ? Et bien soyons clair : ce tome 2 de Hillbilly est du grand art que ce soit au niveau des traits ou de la coloration. Tous les personnages, que ce soit humain ou autres, ont des faciès incroyablement expressif. On pourrait dire que même sans dialogue, on pourrait comprendre le récit. Une narration graphique on ne peut plus efficace et tellement agréable à l ‘œil ! Les teints pastels tirant vers le vert et le jaune donnent à l’ensemble une impression d’authenticité vieillotte comme-ci l’on regardait des photos d’antan aux couleurs délavées. De plus, l’auteur nous sert un chapitre rendu psychédélique en utilisant la méthode des anaglyphes (de la 3D avec des lunettes dotées de 2 verres à couleurs différentes) habituellement des plus casse-gueule et qui pour le coup est simplement une réussite, que l’on décide d’employer les fameuses « lunettes 3d » ou qu’on le regarde à l’œil nu. Même les chapitres qui ne sont pas dessinés par lui mais par Mannion et Simone Di Meo,bien que différents graphiquement, sont parfaitement cohérents avec l’ensemble. Du bien bel ouvrage donc que ce génialissime Hillbilly qui est en passe de devenir le travail de M. Powell que je préfère ! ■
Hillbilly, tome 2 est un comics de 120 pages écrit et dessiné par Eric Powell. Cet album est publié en France par Delcourt au prix de 15,95 €. Les épisodes originaux sont parus aux USA chez Albatross. La traduction de ces épisodes est signée Nick Meylaender.