Avec Final Crisis, Grant Morrison rend hommage au Quatrième Monde de Jack Kirby à travers une épopée jouissive mais aussi ultra-référencée qui pourra laisser certains lecteurs… dubitatifs !
■ par Stéphane Le Troëdec
Depuis de nombreux mois, les sbires du tyrannique Darkseid se sont infiltrés sur Terre pour organiser l’invasion de notre planète. Car Darkseid compte bien cette fois-ci s’emparer de cette Terre qui lui a toujours échappé ! Mais les superhéros n’ont pas encore conscience du danger qui les menace. Pour l’heure, ils en sont encore à se perdre en conjectures sur le cadavre d’Orion, un des Néo-Dieux, qu’on vient tout juste de découvrir…
Guide de survie à l’usage du futur lecteur de Final Crisis !
Autant être prévenu : la manière dont vous allez apprécier Final Crisis dépend énormément de votre niveau de connaissance de l’univers DC ! Et à ce jeu des références ultra-pointues, pas sûr que les jeunes lecteurs et les néophytes s’y retrouvent. On peut d’ailleurs s’interroger sur ce que pourront bien comprendre ces lecteurs profanes. Alors rentrons dans le détail de ce que vous devez au minimum avoir lu pour espérer vous repérer dans Final Crisis. Contrairement à ce que son titre laisse supposer, il ne s’agit pas d’une suite à Crisis on Infinite Earths. Il faut plutôt aller chercher du côté de Jack Kirby, pour commencer. Disons que pour bien faire, je ne saurais trop vous conseiller la lecture du Quatrième Monde (disponible en 4 albums chez Urban Comics). Ce qui permettra de mieux cerner les puissances en jeu dans Final Crisis, des Néo-Dieux au détective Dan Turpin. Enchaînez ensuite avec La Légende de Darkseid, toujours chez Urban, qui raconte déjà une invasion de la Terre par Darkseid et ses sbires. Vous êtes toujours là ? Foncez ensuite sur le run de Grant Morrison sur JLA, pas forcément indispensable mais hautement recommandé. En effet, le scénariste écossais sème déjà certains éléments qui éclosent dans Final Crisis. Enfin (!), ne négligez pas les tomes 1 et 2 de la collection Final Crisis, avec Sept Soldats, la saga préambule qui reprend certains personnages de Jack Kirby… Ouf ! On le voit, Final Crisis nécessite un sérieux bagage pour se lancer. Mais le résultat en vaut la chandelle !
Une démarche étonnante pour raconter une invasion
Car la lecture de Final Crisis constitue une expérience passionnante. À partir d’un postulat somme toute banal, grosso modo l’invasion de la Terre par Darkseid, Grant Morrison développe un scénario étonnant dans sa volonté de vouloir passer en arrière-plan (voir hors-champ) certains événements essentiels. Comme la disparition d’un personnage historique traité en une (petite) case et son enterrement quasi aussi rapide ! Une démarche cohérente sur toute l’œuvre, puisque Final Crisis propose une ambiance surprenante dans un univers DC envahi, où on cherche à nous faire croire que notre Terre est perdue…. Si on était précis, on dirait même que Final Crisis ne raconte pas l’invasion de la Terre mais sa libération par une poigné de super-héros rebelles.
Trois artistes pour une saga délirante
Côté graphique, Final Crisis s’avère encore une fois très plaisant, malgré plusieurs changements d’artistes en cours de route. J.G. Jones ouvre le bal avant de passer la main à Carlos Pacheco. La bascule entre les 2 artistes est relativement discrète dans la mesure où leurs styles sont proches. La transition est par moment plus délicate avec Doug Mahnke dont la patte est par contre ici assez distincte, et l’artiste souffre quelque peu de la comparaison avec ses confrères. Rien qui ne vienne cependant gâcher le plaisir de lecture. D’autant plus que les dessinateurs arrivent à donner corps à certains concepts des plus délirants (des chevaliers à dos… de chiens ?!). Mieux : le dessin vient ici soutenir un scénario dense et qui demande une attention de tous les instants. Lancez-vous à vos risques et périls, mais sachez que le plaisir est au bout de l’aventure ! ■