On avait déjà eu une petite idée de l’avenir de l’univers Valiant dans la saga Rai. Fallen World nous replonge dans ce monde futuriste pas très joyeux. Avec pour guide : Rai, le cyborg au grand cœur.
■ par Stéphane Le Troëdec
Explorer le futur plus ou moins lointain d’un univers partagé est un concept assez classique dans les comics. Marvel Comics et DC Comics se sont déjà illustrés avec des sagas, voir des labels entiers, tels que 2099, L’Ére d’Apocalypse ou plus récemment Future State. Avec Fallen World, c’est au tour de l’univers Valiant de nous donner un aperçu de son avenir avec un récit complet en 5 épisodes particulièrement réussi. Plongez en l’an 4002, dans un univers Valiant méconnaissable ou presque.
La chute de Néo-Japon
An 4002. L’humanité s’est réfugiée dans station orbitale tournant au-dessus d’une Terre ravagée. Sur Néo-Japon, Père, une intelligence artificielle tyrannique, subsistait à tous les besoins des humains. Mais le cyborg Rai, une création de Père, a renversé le despote digital et libéré l’humanité. Hélas, la station orbitale Néo-Japon vole en morceaux qui s’écrasent sur Terre. Rai est bien décidé à guider les survivants sur le chemin de la paix. Sur Terre, un groupe de fanatiques religieux menés par un certain Circadien attend depuis longtemps le crash de Néo-Japon. Ce ne sont pas les seuls ennemis que Rai devra affronter, puisque Père, qui a survécu, peut encore compter sur les agents à sa solde. Rai et ses alliés, parmi lesquels Bloodshot, le Guerrier Éternel et une nouvelle Géomancienne débutante, pourront-il rétablir la paix et la sécurité parmi les survivants ?
Le retour de Rai
Fallen World, c’est d’abord le grand retour de Rai, un personnage Valiant qu’on avait perdu de vue. Matt Kindt et Clayton Crain nous avaient raconté ses aventures futuristes dans 2 albums chez Bliss Éditions. C’est avec plaisir qu’on retrouve ici Rai, dans un rôle de chef, après celui de rebelle. Le cyborg n’a rien perdu de sa superbe. Le voici qui hérite de la mission de rassembler et de guider un peuple dans un univers hostile. D’autant plus qu’après la destruction et le crash de Neo-Japon, ce sont sur de petits groupes de survivants dispersés sur Terre que Rai doit veiller. Le futur de Valiant présenter dans ce Fallen World a très vite l’apparence d’un post-apocalyptique. Rai évolue donc dans une fonction et un environnement tout à fait inédit. Fonction et environnement qui apportent aussi une profondeur étonnante à ce récit futuriste.
Un monde déchu, mais dense et riche
Densité et ampleur, voilà les 2 adjectifs qui viennent à l’esprit en refermant Fallen World. Dan Abnet, le scénariste, parvient en 5 petits épisodes (et 1 numéro 0) à dépeindre un monde déchu, littéralement comme métaphoriquement. Fallen World est plein comme un œuf et il y a peu « de gras » dans le sens où on a presque l’impression que l’artiste aurait eu de quoi s’étendre sur 2 fois plus d’épisodes. Du coup, tout ou presque est efficace et l’histoire ne perd pas de temps en détours inutiles. C’est qu’il en a, des choses à dire, Dan Abnett. Que ce soit la lutte des survivants de Néo-Japon sous la houlette de Rai ; le retour de Père, l’IA malveillante ; les Circadiens, fanatiques religieux ravis de l’opportunité que leur offre la chute de Néo-Japon sur Terre ; les tensions entre les survivants (quel est le prix – moral – à payer pour la survie ?) ; ce que sont devenus les héros emblématiques de Valiant comme Bloodshot ou le Guerrier Éternel ; etc. Il y a de quoi écrire, au point qu’on aurait pas rechigné à une poignée supplémentaire d’épisodes de cet acabit. À noter enfin que même s’il vaut mieux avoir déjà lu quelques séries Valiant pour déguster la substantifique moëlle de Fallen World, l’intrigue essentielle en elle-même peut se comprendre par un nouveau lecteur !
Le grand retour d’Adam Pollina
Adam Pollina est un dessinateur essentiellement connu des lecteurs français pour son passage sur la série X-Force au milieu des années 90 et son travail sur la mini L’Ascension d’Apocalypse de toute beauté. Se faisant par la suite plus discret et moins disponible, Adam Pollina revient à la fin des années 2010 chez Valiant, sur des histoires courtes ou des couvertures. Sur Fallen World, c’est un véritable bonheur de retrouver son style sur un récit complet de 5 épisodes, sans qu’il ne soit remplacé. Tout au plus, Juan José Ryp assure-t-il l’épisode 0 introductif de 8 pages. De là à déclarer qu’il s’agit de son grand retour il n’y a qu’un pas. Très vite, son talent graphique se fait sentir via le langage corporel, les expressions des visages, les décors détaillés et fouillés. Adam Pollina s’empare de personnages emblématiques de Valiant comme Bloodshot ou le Guerrier Éternel pour en livrer une vision assez conforme au canon, certes, mais avec sa patte personnelle, son élégance si plaisante, sans jamais sacrifier à la puissance. On retiendra aussi et surtout son Rai, cyborg d’albâtre transpirant d’humanité, et des scènes de combat parfois dantesques quand on commence à compter les personnages et leur variété. Difficile de bouder son plaisir devant Fallen World puisqu’il marque le retour de Rai et d’un grand artiste. ■
Fallen World est un comics publié en France chez Bliss Éditions. Il contient : Fallen World 1-5 et Fallen World Prologue.