Delcourt continue d’explorer l’univers de James Cameron avec Avatar – S’adapter ou mourir, un comics qui s’inscrit avant le premier film. Ici pas de Jake Sully (le héros d’Avatar), ni de grands duels aériens à dos de banshee, mais un récit plus intime centré sur la docteure Grace Augustine, bien avant qu’elle ne dirige son école pour enfants Na’vi. L’autrice Corinna Bechko, épaulée par le dessinateur Agni R. Lobel, imagine un drame écologique sur fond de malentendus culturels.

Avatar – S’adapter ou mourir s’intéresse à la relation entre humains et Na’vi à un moment où tout était encore possible. Pas de guerre, pas de militaires, juste des scientifiques qui croient sincèrement pouvoir cohabiter avec une civilisation qu’ils ne comprennent pas. L’idée est belle, la mise en pratique un peu moins. Car sur Pandora, chaque bonne intention finit par polluer un ruisseau.

Quand la nature de Pandora tombe malade
Le point de départ du récit est malin : des enfants Na’vi tombent soudainement malades après avoir visité un camp humain. Panique chez les Omatikaya, tensions diplomatiques à la clé. Grace Augustine (l’alter ego de Sigourney Weaver) et Mo’at, la chamane du clan, vont devoir unir leurs connaissances pour sauver les petits. On retrouve là l’essence du propos d’Avatar – S’adapter ou mourir : comprendre avant de juger, écouter avant d’imposer.
Sur le papier, tout y est : un message écologique fort, une réflexion sur la responsabilité humaine et la mise en scène d’un choc des cultures. Mais Corinna Bechko peine parfois à donner du souffle à son intrigue. L’enquête scientifique se transforme vite en balade contemplative, et la tension redescend vite. La nature est malade, mais le scénario lui aussi toussote un peu.
Un univers graphique à la hauteur de Pandora
S’il y a une chose qu’on ne peut pas reprocher à Avatar – S’adapter ou mourir, c’est sa beauté visuelle. Agni R. Lobel et le coloriste Wes Dzioba livrent des planches lumineuses, pleines de détails végétaux, de textures vivantes et de couleurs presque phosphorescentes. On y retrouve la luxuriance du film de Cameron, cette sensation d’immersion totale dans une planète où tout semble respirer.
Les Na’vi sont expressifs, leurs gestes crédibles et leurs regards profonds. Le contraste entre la froideur des installations humaines et la chaleur organique des paysages est particulièrement réussi. Dommage que la mise en scène, très sage, ne cherche jamais à surprendre. On admire Pandora, on ne la ressent pas toujours autant qu’on le voudrait.
Pour les fans absolus d’Avatar, ce voyage dans le passé de Grace Augustine vaut le détour, ne serait-ce que pour ses paysages magnifiques et sa tonalité contemplative.
Un message écologique… un peu dilué
En plaçant son récit avant le premier film, Corinna Bechko cherche manifestement à explorer la genèse du conflit entre humains et Na’vi. L’idée d’une contamination de l’eau par les activités minières humaines résonne avec une actualité bien terrestre. Mais là où James Cameron chargeait frontalement le capitalisme destructeur, Avatar – S’adapter ou mourir reste timide. Le mal vient ici d’une erreur, d’une méconnaissance, pas d’une cupidité assumée.
Le propos se veut nuancé, presque trop. On aurait aimé sentir davantage la colère de Grace, sa frustration face à la bêtise bureaucratique. Au lieu de ça, le récit se clôt sur une résolution rapide, presque anecdotique. Les enfants guérissent, les humains s’excusent, et Pandora continue de tourner. Bref, une crise écologique qui s’efface un peu trop facilement.

Grace Augustine, une héroïne qui oublie de fumer
Le vrai regret de ce Avatar – S’adapter ou mourir, c’est de ne jamais retrouver la Grace Augustine qu’on aime : la scientifique bourrue, cynique, toujours une clope au bec campée par Sigourney Weaver. Ici, elle semble presque trop lisse, comme aseptisée. Un comble quand on sait que son personnage dans le film est précisément défini par son imperfection humaine, par ses contradictions.
Le scénario oublie ce petit détail de rien du tout : Grace ne fume jamais. Dit comme ça, ça peut paraître anodin, mais c’est tout le contraire. Dans un univers où les corps se déplacent entre avatars et réalités, la cigarette de Grace symbolisait sa résistance, sa faiblesse, sa lucidité face à la folie du progrès. Ici, rien. Et c’est peut-être là que le comics perd son âme : il respire Pandora, mais pas vraiment l’humanité.
En conclusion : un beau voyage, mais dispensable
Avatar – S’adapter ou mourir est un album honnête, soigné, parfois touchant, mais qui ne marquera pas la mythologie de Pandora. L’histoire peine à dépasser le statut de simple « produit d’univers », joliment illustré mais un peu creux. On y retrouve les thèmes chers à Cameron (l’écologie, la communication entre espèces, la responsabilité scientifique) sans jamais atteindre l’émotion ou la tension du grand écran.
Pour les fans absolus d’Avatar, ce voyage dans le passé de Grace Augustine vaut le détour, ne serait-ce que pour ses paysages magnifiques et sa tonalité contemplative. Pour les autres, disons que Delcourt a publié des récits plus mémorables. À vouloir s’adapter, cette mini-série finit par trop bien le faire.

Avatar : S’adapter ou mourir est un comics publié en France par Delcourt. Il contient : Avatar : Adapt or Die 1 à 6.