
Oubliez les zombies qui traînent la patte en grognant comme dans Walking Dead. Dans Revival, personne ne se fait mordre par un voisin mal luné avant de finir en steak tartare. Non, ici, on est dans le Wisconsin, à Wausau, où un beau matin, certains morts reviennent à la vie. Pas tous. Juste… quelques-uns. Et sans explication. Vous imaginez la panique ? Vous enterrez mamie le mardi, et le vendredi elle revient sonner à la porte en vous demandant pourquoi vous avez bazardé son fauteuil au vide-grenier. Ambiance.
Tim Seeley au scénario et Mike Norton au dessin évitent le grand cirque gore pour nous plonger dans un polar fantastique à la croisée de Fargo et The Leftovers. On suit Dana Cypress, flic et mère célibataire, et sa sœur Em (qui, petit détail, fait partie des « revenants »). Autour d’elles, toute une galerie de personnages crédibles, du biologiste à la journaliste fouineuse, en passant par le raciste local qui ferait passer les trolls de Twitter pour des enfants de chœur. Et chaque perso a droit à son petit moment, pas de figurants oubliés dans un coin de case.

Revival : une intrigue au cordeau et des personnages qui respirent la vraie vie
Là où Revival marque des points, c’est dans la gestion de son casting XXL. Tim Seeley jongle entre les intrigues comme un prestidigitateur, sans jamais perdre le lecteur. Une scène de routine policière ? Elle bascule sur un moment intime, puis sur un détail bizarre qui vous rappelle qu’on est quand même dans une ville où les morts reviennent. Résultat : on s’attache vite aux personnages, même aux plus antipathiques (oui, toi, Edmund Holt et ton bonnet orange).
Et au milieu de tout ça, un mystère qui dépasse largement la simple question « pourquoi eux ? ». Les enjeux sont aussi sociaux : racisme latent, tensions religieuses, fracture entre quartiers riches et pauvres… Bref, Tim Seeley s’amuse à coller son fantastique dans un décor bien réel, et c’est ce réalisme qui rend le truc aussi dérangeant. Parce que si ça arrivait pour de vrai, ce serait probablement aussi moche et compliqué que dans Revival.

Un duo artistique qui sait créer le malaise
Graphiquement, Mike Norton met le paquet sur le réalisme. Pas de tronches clonées : chaque personnage a son visage, son âge, son attitude. Dana et Em ressemblent vraiment à des sœurs, mais avec des gestes, des regards, des attitudes qui les différencient. Un travail d’orfèvre qui rend la lecture fluide et crédible. Certaines créatures (des silhouettes fantomatiques qui traînent dans les bois) sont dessinées avec juste ce qu’il faut de bizarrerie pour vous donner envie de laisser la lumière allumée.
Côté couleurs, Mark Englert opte pour des tons froids, presque ternes, parfaits pour un petit bled enneigé. Le rouge du sang (are, mais efficace) tranche avec le reste de l’ambiance graphique. Et même une poursuite en motoneige arrive à être nerveuse sans en faire des caisses. Bref, visuellement, Revival réussit à vous filer le frisson sans passer par le mode « effusion de tripes ».

Verdict : Revival est pour ceux qui aiment frissonner intelligemment
En onze épisodes, ce premier tome pose un univers dense, intrigant, et franchement addictif. Ce n’est pas un défilé de cadavres ambulants : c’est une plongée dans une communauté qui se fissure sous le poids de l’inexplicable. Du fantastique mâtiné de chronique sociale, du suspense, des personnages qui sonnent juste… et une bonne dose de mystère pour vous faire revenir. Cette intégrale s’étalera sur 4 tomes en tout.
Si vous cherchez du zombie bête et méchant, passez votre chemin. Si par contre vous aimez quand l’horreur se glisse dans les interstices du quotidien, Revival pourrait bien vous happer jusqu’à la dernière page. Et vous laisser avec une question qui gratte : et si c’était nous, demain ?
